Texte 4 - proposition de traduction, groupe N. Pinet

Hara, Takeshi [原武史] et Kiyoshi Shigematsu [重松清], Danchi no jidai [団地の時代 ; L’Ère des grands ensembles], Tokyo, Shinchōsha [新潮社], « Shinchō sensho » [新潮選書  ; Livres choisis de Shinchō], 2010, p. 12-13.

Parmi les habitants des grands ensembles qui ont désormais plus de 70 ans, presque tous vivent probablement depuis déjà 30 ou 40 ans, voire plus, au même endroit. Quand ils ont commencé à y vivre, le mot « grand ensemble » était empreint d’un éclat difficilement imaginable aujourd’hui. Les grands ensembles étaient extrêmement renommés et il n’était pas rare que des personnes participent trente fois sans succès au tirage au sort d’attribution. Au début, des couples dans la vingtaine ou la trentaine, sans attaches ni relations sur place, ont emménagé d’un coup et, avec les naissances successives, la population des grands ensembles était en hausse continuelle. Avec la création des associations de quartier, d’organisations et de cercles locaux formés par les habitants sur la base d’intérêts politiques ou culturels communs, les grands ensembles ont été le berceau de communautés dynamiques.

Mais maintenant, les grands ensembles, vieillis, font les uns après les autres l’objet de travaux de rénovation qui les transforment en grandes tours avec ascenseur baptisées non plus « grand ensemble de… » mais d’appellations d’origine étrangère comme « Sun Valley », « Green Town », « Art Hill » ou « Sun Raffle » et qui ressemblent à s’y méprendre aux immeubles résidentiels privés. Avant la rénovation, les habitants sont expulsés et les grands ensembles transformés en des sortes de ruines interdites d’accès. Et dans les grands ensembles non rénovés, la vie des personnes âgées devient d’autant plus difficile que leur appartement se situe aux étages supérieurs d’immeubles aux nombreux escaliers.